Payer les gradués — une mauvaise idée

24 juin 2017

Gérald Larose et Alexandre Taillefer étaient invités de Franco Nuovo à la radio il y a une semaine ou deux. On y discutait de plein de trucs, entre autres de la proposition de Mitch Gerber de donner 1000$ aux élèves qui obtiennent un diplôme d’études secondaire, pour enrayer le décrochage scolaire. L’échange qui suit me trotte dans la tête depuis.

Sans surprise, Gérald Larose s’indigne. C’est une tentative de marchandisation de l’éducation, c’est inacceptable, nous dit-il. Taillefer, lui, n’est pas catégorique. Toutes les idées valent la peine d’être étudiées, nous dit-il. La carotte et le bâton ont toujours été des motivateurs puissants.

La discussion continue pendant quelques minutes, mais on n’avance pas beaucoup plus.

J’aurais préféré entendre Larose s’opposer de façon plus concrète. Parler de marchandisation de l’éducation, c’est bien intéressant d’un point de vue philosophique (et je suis d’accord avec l’opinion), mais je crois pas que ça serve à grand-chose sur le plancher des vaches.

Il me semble que ça aurait été plus concret de remarquer que ce qui sous-tend la proposition de Gerber, c’est que les problèmes de décrochage au Québec sont extérieurs au système. Gerber suppose que si un élève ne gradue pas, c’est parce qu’il est paresseux et qu’on va pouvoir le motiver avec un peu d’argent. Exit le contexte familial, le quartier, les troubles d’apprentissage, le sous-financement de nos écoles…

Cette opinion est dangereuse parce qu’elle cautionne le désengagement du gouvernement envers notre système d’éducation. Il n’y a pas de place pour la gouvernance provenant du privé dans notre système d’éducation. Les motivations d’une entreprise privée ou d’un entrepreneur ne sont pas compatibles avec la mission d’éducation. Un entrepreneur, ce n’est bon que pour une chose: s’enrichir.

C’est pourquoi je déprime quand j’entends Taillefer, avec toute la candeur qu’on lui connaît, dire à propos du système d’éducation que la carotte et le bâton ont toujours été les motivateurs les plus puissants. J’ai le goût de lui faire remarquer que jouer avec la carotte et le bâton, ça sert pas à grand-chose si l’étable est en train de tomber en ruine et qu’il y a pas assez de moulée pour tous les chevaux.

(ce petit texte a été originalement posté sur Facebook)